Rond-PointAccueilHistoireL'affrontement Lesage-Johnson (1962)


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Questions des journalistes

Pelletier : M. Lesage, vous avez dit que, en deux ans, votre gouvernement avait réalisé son programme dans une proportion de soixante pour cent. Ma question est la suivante : Qu'est-ce que votre gouvernement a fait dans le domaine du travail organisé, et est-ce que je me trompe en croyant que, sur deux objectifs majeurs de votre programme, le Code du travail et les tribunaux du travail, votre gouvernement n'a pas encore agi ?

Lesage : Voici, je... ce que j'ai dit, c'est que nous avions soit réalisé, soit amorcé - et que c'était en bonne voie - plus de soixante pour cent de notre programme de '60, et cela en deux ans seulement. Pour ce qui est du domaine du travail, j'ai ici le programme de '60 et je vous dirai simplement un mot : " Le conseil supérieur du travail devra se mettre sans délai à l'œuvre et préparer un Code qui refondra toute notre législation du travail et qui donnera naissance à de vrais tribunaux du travail. " Je suis sûr que M. Pelletier faisait allusion à cet article de notre programme. Or, nous avons demandé au Conseil du travail d'agir sans délai. Mais malheureusement, la maladie de son président, qui s'est prolongée à deux reprises pendant plusieurs mois, a retardé le travail. Et ce n'est qu'au cours de la dernière session que nous avons reçu le rapport du Conseil supérieur du Travail.

Sur un grand nombre de points, il n'y avait pas unanimité entre les représentants du travail organisé et les représentants des employeurs. Et souvent sur des points majeurs. Il appartient au gouvernement de trancher ces litiges et de présenter à la prochaine session un Code du travail, et sur les points litigieux, de se servir de son meilleur jugement pour assurer le bien commun et la paix industrielle dans ces domaines.

Charette : M. Bantey?

Bantey : M. Johnson, durant la campagne électorale vous avez critiqué les Libéraux parce que, d'après vous, ils ont attaqué l'entreprise privée. Mais vous dites aussi que, si vous êtes porté au pouvoir, vous allez augmenter les impôts de ceux qui ont les moyens de payer. Est-ce que de cette façon vous n'attaquez pas, vous aussi, l'entreprise individuelle?

Johnson : Voici, M. Bantey, je n'ai pas exactement dit qu'il attaquait l'entreprise privée, j'ai dit qu'ils ont rendu le climat impossible pour l'entreprise privée, ce qui explique d'ailleurs que le chômage ne diminue pas dans le Québec alors qu'il a diminué ailleurs. Les derniers chiffres qui ont été publiés l'établissent clairement. Et ce n'est pas... ce que j'ai dit, M. Bantey, et c'est là qu'est le problème, je trouve que le gouvernement actuel a un faux principe, le principe que M. Mackenzie King a enseigné à M. Lesage, taxer tout le monde, même ceux qui n'ont pas les moyens de payer des taxes, pour distribuer de l'argent à tout le monde, même à ceux qui n'en ont pas besoin. Et c'est ça qui est mauvais. C'est ça qui est trop dans le cas de ceux qui n'en ont pas besoin, et ce n'est pas assez dans le cas... pour les cas où on en a besoin. C'est là un faux principe, il faudra - et notre programme le permet - faire une refonte de la structure de la taxation, et ça je crois que c'est fondamental. Il faut repenser tout le problème de la taxation, la répartition des charges. Et ça s'applique aussi dans le domaine provincial et municipal. Ça s'applique dans le domaine des Commissions scolaires. Il va falloir donner aux municipalités d'autres sources de revenus, il va falloir leur aider, ça n'a pas de sens. Le gouvernement actuel leur passe des obligations. Le gouvernement actuel a tenu certaines promesses, oui, les $ 200, mais fait payer par les Commissions scolaires après leur avoir enlevé les deux pour cent qu'elles avaient dans certaines, dans un très grand nombre de municipalités scolaires. En somme, il faut repenser le problème et il faudra faire payer des impôts par les plus gros et détaxer les plus petits. Et les plus gros, à mon sens ça peut commencer à bien des endroits, mais ça commence après qu'on a établi le revenu familial et les déductions en conséquence.

Charette : M. Dufresne, s'il vous plaît.

Dufresne : M. Lesage, vous réclamez constamment l'abolition des programmes conjoints, telle la route Trans-Canada entre Montréal et Québec. Et pourtant cette route se construit à l'heure actuelle, sous votre administration, sous un programme conjoint. Est-ce que vous pouvez justifier cette contradiction dans votre politique?

Lesage : Ça n'est pas une contradiction, loin de là. D'ailleurs, dès 1960. le 25 juillet '60, j'ai exposé à la conférence fédérale-provinciale quelles étaient les idées du gouvernement sur les programmes conjoints. J'ai demandé que le gouvernement se retire graduellement des programmes conjoints et qu'au fur et à mesure il remette aux provinces, - avec système de péréquation parce que c'est essentiel, c'est évident - les revenus, pour que les provinces puissent se charger totalement de ces programmes conjoints. Le gouvernement fédéral, jusqu'à présent, a refusé. Et j'ai déclaré que, tant et aussi longtemps que le gouvernement fédéral refuserait, nous n'avions pas le droit de laisser les payeurs de taxes du Québec, les payeurs de taxes du Québec au fédéral, payer par exemple pour l'hospitalisation des citoyens des autres provinces, sans en retirer un sou ; payer pour la route Trans-Canada dans les autres provinces sans en retirer un sou, c'est absolument injuste pour les contribuables du Québec, ceux qui paient des taxes au fédéral. Et par conséquent, malgré notre répugnance aux programmes conjoints, pour éviter un plus grand mal, aux citoyens, aux contribuables du Québec, eh bien ! nous avons accepté d'y participer pour le moment.

Charette : M. Lesage...

Lesage : J'avais terminé.

Charette : Je m'excuse.

Charette : La quatrième question qui doit faire l'objet de ce débat porte sur l'administration libérale depuis 1960. Ce sujet parle sans doute de lui-même, mais on pourrait peut-être souhaiter, à la veille d'une élection générale, que les chefs de partis en parlent aussi. M. Johnson, s'il vous plaît.


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