Rond-PointAccueilHistoireL'affrontement Lesage-Johnson (1962)


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Questions des journalistes

Langlois : M. Johnson, selon vous M. Lesage a manqué à sa promesse de 1960 en n'abolissant pas le patronage. De quelle façon, selon vous, que cette promesse là a été violée ? Auriez-vous quelques exemples ?

Johnson : M. Langlois, dans tous les comtés on en a des exemples par douzaines, et à la centaine et au millier d'exemplaires. On a mis à la porte tous les employés, d'abord, qui avaient eu le malheur d'être engagés du temps de l'Union nationale et on a créé des injustices que moi je défendrai à mes députés de créer le lendemain des élections du 14 novembre.

Deuxièmement, on sait comment, en certaines affaires qui ont été expliquées, qui ont pris les journaux, comment on a favorisé des amis. Tout le monde sait que ceux qui vendaient, par exemple, à l'Hydro ont été automatiquement éliminés, et qu'on ne leur demandait pas de prix, sauf qu'à la toute dernière minute on a envoyé des lettres à plusieurs marchands reconnus comme sympathiques à l'Union nationale ; M. Levasseur leur a dit : " Envoyez-nous donc une lettre ou une demande. " Ça a été évidemment une manœuvre électorale pour tâcher d'induire certaines personnes à s'intéresser au Parti libéral. C'est trop tard.

Tout le monde sait, à part ça, que dans le comté de Drummond, par exemple, on a donné un contrat à des amis. J'ai vu des annonces partout. On en a parlé hier soir, on a donné un contrat 16,000 dollars plus cher à un ami. Ce sont tous les membres de la Fédération libérale qui contrôlent, qui sont les directeurs de cette compagnie. Vous pensez, personne n'y croit, nulle part dans la province, que le système du patronage a été aboli, et je crois, moi, que le Comité qui comprendra des membres de l'opposition, - ceux de l'opposition libérale, il doit en rester un minimum, je le répète - ce Comité-là verra à ce que réellement on suive ce qui se fait des directives qui ont été données. Et si je pouvais parler de la Manicouagan, si j'en avais le temps, on verrait là que c'est du vrai patronage et pas de rapport à l'Assemblée législative, en vertu d'une loi !

Charette : M. Johnson, merci, M. Brown, maintenant.

Brown : M. Johnson, vous avez parlé d'assurance-hospitalisation et j'aimerais savoir quels sont les griefs que vous avez contre l'administration de l'assurance-hospitalisation par le gouvernement libéral ?

Johnson : D'abord, ça devrait être administré par une Régie indépendante. Il ne faudrait pas que la liberté des médecins, des syndicats et des autres, aille mourir dans l'antichambre du premier ministre ou du Ministre de la Santé.

Deuxièmement, nous considérons qu'encore là, elle est injuste pour certains hôpitaux. Les per diem, on ne permettra pas, par exemple, l'amélioration de certains hôpitaux qui étaient très en retard dans leurs standards ou qui sont récents et veulent améliorer leurs standards, alors que d'autres sont rendus au maximum. Troisièmement, en sortant de l'hôpital, le pauvre comme le riche sont confrontés avec un compte de médecins, de chirurgiens, d'anesthésistes et de prescriptions de sortie de la pharmacie. C'est ça qui est injuste, à mon sens. Encore là, on en donne trop à ceux qui n'en ont pas besoin et on n'en donne pas assez à ceux qui en auraient besoin, qui en ont réellement besoin. Il faudra donc modifier dans ce sens-là, afin d'aider davantage ceux qui ont le plus besoin d'être aidés et ça, ça peut être établi par des barèmes. Il n'est pas question de faire des enquêtes, il n'est pas question de choquer personne, de fouiller dans la vie de personne ; d'ailleurs, des enquêtes sont faites dans le cas des vieillards de 65 à 70 ans qui sont déjà aidés, qui reçoivent déjà une assistance ; ça pourrait être automatique, le défraiement de ces frais-là, puisque l'enquête est déjà faite dans le cas des mères nécessiteuses, des infirmes et des invalides. En somme, nous pourrions, et nous allons le faire, après avoir consulté les principaux corps intéressés, les professions, les syndicats et les hôpitaux, nous allons modifier la loi de façon a avoir soin davantage de ceux qui ont le plus besoin qu'on ait soin d'eux, et j'espère qu'on pourra évoluer vers un système d'assurance-santé provincial, sans avoir l'étatisation de la médecine que je n'approuve pas, moi, et que mon parti non plus n'approuve pas.

Charette : M. Sauriol ?

Sauriol : M. johnson, ce que vous reprochez davantage au gouvernement en matière d'impôt, c'est la taxe, l'impôt sur le revenu qui a été majoré pour l'assurance-hospitalisation. Mais l'alternative, c'était de financer l'assurance-hospitalisation par des primes d'assurance que paieraient tous les citoyens. Est-ce que c'est ça que vous préférez ?

Johnson : Encore là, vous avez une affirmation gratuite. Vingt fois, le premier ministre a nié, en Chambre, que les exemptions étaient baissées à cause de l'assurance-hospitalisation et il était ministre des Finances en même temps. Il a nié. Il avait promis l'hospitalisation gratuite, il a baissé les exemptions et, en Chambre, il a nié à plusieurs reprises, dix, vingt fois peut-être, -- le débat a duré deux semaines, -- que c'était pour l'assurance-hospitalisation. Mais ça, vous ne semblez pas tenir compte de cela, M. Sauriol, et votre affirmation est gratuite. M. Sauriol, je regrette, mais ne me faites pas... la réalité, j'étais là, moi, en chambre et j'ai conduit un débat avec M. Talbot et mes autres collègues pendant quinze jours de temps et nous aurions donc voulu que le gouvernement le dise à ce moment-là. Mais il n'a jamais voulu l'admettre et ce n'est pas pour ça... ça ne nous empêchera pas de détaxer les gens, nous autres, pour deux mille et quatre mille.

Charette : Merci, M. Johnson. Mesdames, Messieurs, vous savez que la loi qui régit la radiodiffusion interdit la diffusion de toute émission de caractère politique dans les deux jours qui précèdent le scrutin. Ce sera donc la dernière occasion qu'auront messieurs Johnson et Lesage de s'adresser, pendant cette campagne, à la population, par le truchement de la radio et de la télévision.

Il a cependant été convenu que les deux chefs politiques disposeraient chacun de cette période de cinq minutes pour résumer leurs positions respectives sur toutes questions pertinentes au présent débat. Encore une fois, nous allons procéder au tirage au sort afin de savoir qui, de M. Johnson ou de M. Lesage aura la faculté de choisir de parler en premier ou en second.

(Charette s'applique à ouvrir l'une des boîtes qui sont placées sur la table ; il remarque que " c'est dangereux, non seulement pour ceux qui vont prendre la parole, mais pour moi ".

(Il retire enfin un tube, et en extrait un nom.)

Charette : Voici, M. Daniel Johnson peut choisir. Nous allons cependant encore une fois vérifier, comme nous avons fait tout à l'heure, si le nom de M. Lesage apparaît sur le deuxième bulletin. (Il déroule le deuxième nom et le présente aux téléspectateurs. C'est bien celui de M. Lesage). Voilà. M. Johnson, vous choisissez de parler le premier ou le deuxième ?

Johnson : Je cède cet honneur au premier ministre, c'est peut-être la dernière fois que je pourrai être déférent pour lui, en tant que premier ministre...

Charette : M. Lesage, la parole est à vous ; allez-y pour cinq minutes.


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